La rentrée sera bilingue

Jeudi matin, le collège de la Largue à Seppois-le-Bas ouvrira une section bilingue franco-allemande. C’est l’épilogue d’un bras de fer qui depuis 2003 opposait les parents d’élèves et les élus d’un côté et l’Education nationale de l’autre.

A partir de cette rentrée le collège de la Largue à Seppois-le-Bas proposera une section bilingue franco-allemande. (Photo DNA)zoom

A partir de cette rentrée le collège de la Largue à Seppois-le-Bas proposera une section bilingue franco-allemande. (Photo DNA)

« Chat échaudé craint l’eau froide » : Jean-Jacques Schloesslen, maire de Largitzen et président du syndicat intercommunal des affaires scolaires et culturelles du collège (SIAC), restait hier matin prudent. « Nous ne possédons pas pour l’instant de confirmation écrite de l’ouverture du cursus bilingue pour cette rentrée », expliquait l’élu, préférant dès lors adopter une posture version Saint-Thomas. « Je le croirai quand je le verrai ». Un positionnement d’autant plus compréhensible que ces jours derniers, cette non-confirmation écrite de la part de l’Education nationale alimentait la rumeur : l’ouverture d’une section bilingue avorterait une nouvelle fois.
Mais il n’en est rien. Hier après-midi, Emmanuelle Hardy, la principale du collège ne laissait planer aucun doute. « Oui, un cursus bilingue ouvrira à la rentrée en classe de 6 e. Six élèves y sont inscrits à l’heure actuelle. Neuf heures de cours seront assurées en allemand : quatre de langue et culture allemandes, deux heures d’histoire, deux heures de mathématiques, une heure de techno. Le reste, soit dix-neuf heures au maximum, le sera en français ». Toujours hier après-midi, l’inspectrice d’académie en personne, Maryse Savouret, faisait savoir que les élus et les parents inquiets pouvaient se tranquilliser. « L’ouverture d’un cursus bilingue est acquise depuis le 2 juin ». Et rien n’a changé depuis.

Sept ans de procédure et de polémique

Cette ouverture marque la fin d’une longue polémique démarrée en 2003. Cette année là, les premiers enfants scolarisés en classe bilingue dans le premier degré devaient intégrer la 6 e. A l’époque, l’Education nationale refuse d’ouvrir un tel cursus au collège de Seppois-le-Bas et renvoie les élèves de la vallée de la Largue vers le collège d’Altkirch, seul établissement sundgauvien à proposer ce type d’enseignement. Les parents d’élèves crient alors au scandale, dénonçant l’obligation faite ainsi aux élèves de se lever aux aurores, de voyager en autobus en compagnie des lycéens et d’abandonner leurs copains. Plusieurs élus locaux et associations de défense du bilinguisme accusent l’Education nationale de « vouloir tordre le cou à la filière bilingue », cette non-continuité du cursus entre le primaire et le collège démotivant fortement les parents de jeunes enfants tentés par cette filière. Manifestations, lettre ouverte, pétition, rien n’y fera, l’Education nationale ne variera pas sa position d’un iota. Pour l’institution, la continuité est assurée à Altkirch et se déplacer de Seppois vers Altkirch est tout ce qu’il y a de plus normal. L’affaire prend une tournure juridique en 2005. Un couple de parents de Saint-Ulrich assigne l’Education nationale au tribunal administratif de Strasbourg. Les époux Rysak dénoncent justement cette « non-continuité de l’enseignement bilingue », notion entre-temps reprise dans une convention liant l’Education nationale et les collectivités locales d’Alsace qui mettent la main au porte-monnaie pour soutenir la filière franco-allemande. L’association des parents d’élèves de l’enseignement public d’Alsace (APEPA) et « Culture et bilinguisme – Schickelé Kreis », s’associent au recours déposé par les parents. Mais les juges trancheront en faveur de l’Education nationale, estimant la continuité assurée par le collège d’Altkirch.

Francis Demuth : « redynamiser toute la filière »

Suivra une longue période de statu quo qui eut pour effet de saper la filière en primaire au grand dam des élus qui ne cessèrent de fustiger l’Education nationale pour son « immobilisme ».
« Il a fallu près de dix ans pour obtenir gain de cause. Pendant toutes ces années on nous a considéré comme des pestiférés », grondait hier encore Francis Demuth, maire de Seppois-le-Bas, toutefois soulagé de constater que « le vent tourne ». Selon lui, la diminution de l’emploi frontalier sundgauvien en raison de la non maîtrise de l’allemand n’est sans doute pas étrangère à cette évolution positive du bilinguisme scolaire, notion aujourd’hui prise en considération jusque dans les hautes sphères de l’Education nationale. Lors d’un déplacement sur l’île de la Réunion la semaine dernière où l’école a déjà repris, le ministre Luc Chatel a ainsi parlé des classes bilingues franco-créole comme « d’un élément de la lutte contre l’illettrisme ».
Pour le maire de Seppois-le-Bas, l’existence d’une section bilingue au collège « devrait maintenant redynamiser toute la filière depuis la maternelle ».

Julien Steinhauser

Au collège de Seppois, la rentrée des enseignants se fera mercredi 1er septembre à 9 h ; celle des élèves de 6 e jeudi 2 septembre à 8 h ; et celle des élèves de 5 e, 4 e et 3 e vendredi 3 septembre à 8 h

Commentaires fermés.